05/08/2013 à 12h:02 Par Rémi Carayol, à Bamako
Soumaïla Cissé (ci-dessus) affrontera IBK au second de la présidentielle malienne, le 11 août.© Reuters
Avec près de 20 % des voix, le candidat de l’Union pour la république et la démocratie (URD), Soumaïla Cissé, est arrivé en second position du premier tour de la présidentielle malienne. Même si son adversaire, Ibrahim Boubacar Keïta, dit "IBK", a récolté près du double des voix, celui qui fait figure d’outsider reste confiant. Entretien.
Samedi 3 août, dans un hôtel de Bamako. C’est le matin. Soumaïla Cissé a de petits yeux. Il se dit fatigué : il a reçu jusque tard dans la nuit – des partisans et des candidats venus négocier leur ralliement. La veille, le ministre de l’Administration territoriale a dévoilé les résultats provisoires du premier tour de l’élection présidentielle, que la Cour constitutionnelle doit entériner en ce début de semaine. Soumaïla Cissé est arrivé en deuxième position avec 19,4% des suffrages, très loin derrière son vieux rival Ibrahim Boubacar Keïta (39,2%), mais loin aussi devant le troisième, le candidat de l’Adema, Dramane Dembélé (9,6%). Le 11 août, les Maliens devront donc choisir, pour diriger le pays, entre ces deux anciens dauphins du président Alpha Oumar Konaré. S’il ne part pas favori, Cissé croit encore en ses chances.>> Lire : "Présidentielle malienne : IBK et Soumaïla Cissé s'affronteront lors d'un second tour"
Jeune Afrique : Vous attendiez-vous à de tels résultats ?
Soumaïla Cissé : Non. Nous pensions que l’écart (avec Keïta, NDLR) serait moins grand, nous espérions même être devant. Mais il y a eu trop de dysfonctionnements. Le nombre de bulletins nuls est anormal, 400 000 ! Je peux affirmer que la moitié sont les miens. D’autre part, beaucoup de bulletins ont été vendus en ville, la veille du scrutin, ce qui signifie que des gens ont voté à l’avance. Nous avons aussi dénombré 900 bureaux fictifs. Il n’y aurait pas dû avoir un écart aussi grand (entre lui et Ibrahim Boubacar Keïta, NDLR). Enfin, le ministre de l’Administration territoriale, le colonel Moussa colonel Moussa Sinko Coulibaly, a montré un réel parti pris, nous ne lui faisons pas confiance.
Est-il rattrapable ?
Oui. C’est une nouvelle élection qui débute au Mali. Je vais me battre pour que ce second tour soit transparent. Il faut régler trois choses : le dépouillement - il ne faut plus que l’on jette le vote des gens à la poubelle simplement parce que l’encre dépasse légèrement du cadre -, la sécurisation du bulletin de vote, qui ne doit pas venir de l’extérieur, et mettre fin aux bureaux fictifs.
>> Lire : "Présidentielle malienne : qui sortira vainqueur du match IBK-Cissé ?"
Êtes-vous favorable à un report du second tour ?
Non, reporter pour reporter ne mènerait à rien. Il faut régler les problèmes, et c’est possible.
De nombreux candidats ont rallié - ou vont le faire - votre adversaire…
Chez nous, le report des voix n’a rien d’automatique.
Mais sans eux, difficile de rattraper votre retard…
Nous mènerons une campagne plus offensive à Bamako (où Keïta le devance de 350 000 voix, un gouffre, NDLR). Je reconnais que durant la campagne du premier tour, j’ai surtout fait campagne hors de la capitale. Cette fois, je vais faire le maximum à Bamako et à Kati.
Je vais mettre l’accent sur les solutions aux problèmes de tous les jours, le pouvoir d’achat, la pauvreté, l’emploi…Qu’allez-vous dire aux Maliens pour les convaincre de vous choisir ?
Je crois que l’attente des Maliens se situe au niveau des besoins de la vie quotidienne, plus que sur les questions de sécurité ou de fierté nationale. Je vais mettre l’accent sur les solutions à apporter aux problèmes de tous les jours, comme le pouvoir d’achat, la pauvreté, l’emploi… Il n’y a pas qu’au Nord où les gens veulent la sécurité, des routes et de l’électricité. Il y a des zones, au Sud, qui ne sont pas plus développées qu’au Nord.
Tout de même, la pacification du Nord sera un des chantiers les plus urgents du futur président…
Oui, mais je persiste, le problème au Nord est, comme au Sud, un problème de développement.
Votre adversaire a l’image d’un homme de rupture avec le régime d’Amadou Toumani Touré. Pas vous…
Mais il a été pendant dix ans à ses côtés ! Pendant cinq ans, il a été le président de l’Assemblée nationale. Et les cinq autres années, son parti a compté un ministre dans le gouvernement. Mais je ne veux pas rentrer dans ce petit jeu. Je n’ai pas fait d’attaque personnelle au premier tour, je n’en ferais pas au second.
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Propos recueillis par Rémi Carayol, à Bamako
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