Soumaïla Cissé (candidat à la
présidentielle du Mali) :
Interview réalisée par Adélaïde Konin
Soumaïla Cissé est l’ex-président de la Commission de l’Uemoa et un
briguera la magistrature suprême sous les couleurs de ce parti politique.
Pouvez-vous donner les raisons de
cette visite en Côte d’Ivoire ?
Je suis venu rencontrer les autorités ivoiriennes.
J’ai pu échanger avec le président
de la République, Alassane Ouattara
et certains ministres. Nous avons essentiellement
parlé de la crise au Mali. Je crois
qu’il est important d’échanger avec les
autorités ivoiriennes, en particulier le président
en exercice de la Communauté
économique des états de l’Afrique de
l’ouest (Cedeao) et qui joue un rôle majeur
dans la résolution de la crise.
Avez-vous rencontré la communauté
malienne en Côte d’Ivoire?
Bien sûr que c’est de bon ton de rencontrer
les Maliens. Nous nous sommes entretenus
samedi et dimanche. Ils ont été
informés de la situation au Mali. En retour,
nous avons pris leur avis et les avons mobilisés
pour les élections à venir. Leur vote
est assez déterminant.
Parlant justement de l’élection présidentielle,
pensez-vous que la date du
07 juillet sera tenue ?
C’est évident qu’il y a d’énormes défis
auxquels il faut faire face. Et, il y a un gouvernement
qui est responsable. En tant
qu’acteur, nous nous préparons à cette
échéance, en encourageant le gouvernement
à travailler davantage pour respecter
la date qu’il a lui-même annoncé. Il y
va de la crédibilité de ce gouvernement de
transition qui doit mettre en place un
gouvernement élu et qui doit également
conforter les partenaires qui ont aidé le
Mali dans ces difficiles moments. Nous y
croyons.
A votre avis, les candidats pourront-
ils faire campagne dans la mesure
où l’insécurité subsiste au nord ?
Le Mali est un pays extrêmement vaste. En
situation normale, les trois semaines de
campagne officielle ne suffisent pas. Il est
évident que chacun aura sa stratégie et en
fonction d’elle, il visitera certaines localités
et il fera de la communication pour
d’autres. Et tout dépend des relais que
chacun a à l’intérieur du pays pour faire
passer le message.
Pensez-vous que vous avez des
chances…
J’ai un parcours assez connu tant au niveau
du Mali qu’au niveau de l’extérieur. J’ai
participé déjà à une présidentielle en 2002.
Sur 24 candidats, j’ai été deuxième. Et
comme les hommes changent et la situation
aussi, il faut aller confiant et se donner
les chances de gagner. Mais il est évident
qu’il y a des adversaires qui ont aussi un
passé assez glorieux. En définitive, c’est au
peuple malien de choisir et son choix sera
respecté.
Il parait que vous êtes le candidat
des institutions internationales. Quel
commentaire faîtes-vous?
Non, je suis le candidat des Maliens. Ce
ne sont pas les institutions qui votent et
elles n’ont jamais imposé quelqu’un à un
peuple. Il est bon d’avoir de bonnes relations
avec les institutions et cela peut aider
une fois au pouvoir. Il faut le dire, chacun
à ses domaines de force et de faiblesse. Il
y a certains qui sont mieux vus dans certaines
régions… Il ne faut pas s’arrêter sur
les apparences, il faut travailler et
convaincre.
Les Maliens vous trouvent rigoureux.
Ils craignent qu’une fois au pouvoir,
vous instaureriez un système rigide
comme tous les économistes d’ailleurs.
Qu’en dites-vous?
Je ne crois pas. J’ai eu à gérer pendant plus
de six ans les Finances du Mali et cela
s’est bien passé. Aujourd’hui, c’est une
réalité, la Mali a besoin d’une bonne gouvernance
; nous devons défendre des valeurs
et ces valeurs, il faut les porter soimême.
Il faut lutter contre la corruption et
toutes les autres tares. Je ne pense pas que
les Maliens refusent la transparence et la
bonne gouvernance. Il faut le leur montrer
et il faut le faire sans hypocrisie et sans arrière-
pensée.
Quel commentaire faites-vous de
la décision de la Misma de désarmer les
rebelles du Mnla ?
Le Mali essaie de faire la promotion de la
démocratie. Nous voulons construire une
république démocratique. La force d’une
république, ce sont ses institutions, à savoir
le président, la justice, l’assemblée nationale
et l’armée. L’armée doit être unique.
Dans aucun pays au monde, il n’existe
deux armées. On ne peut pas avoir une armée
au Mali et laisser le Mnla, un groupe
armé faire la loi. C’est contradictoire aux
valeurs de la démocratie et ces valeurs,
nous les défendons avec le monde entier.
Le Mnla doit désarmer. En revanche, il
faut des garanties à cette rébellion. Il faut
assurer leur sécurité et respecter leur droit.
Comment allez-vous gérer la question
de l’Azawad, si vous êtes élu ?
L’Azawad n’existe pas de mon point de
vue. Je suis du nord, le mot Azawad est un
nom qui sert de ralliement à un certain
groupe armé. Nous sommes dans un pays
où les problèmes existent au nord, tout
comme au sud et au centre. Il y a un problème
de développement au nord, mais
n’oublions pas que le Mali fait partie des
pays les plus pauvres du monde. Il faut se
faire aider par des partenaires au développement
et créer une nouvelle forme de
gouvernance avec une décentralisation
plus poussée, où les acteurs seront responsabilisés.
Quelles sont vos relations avec la
junte ?
Je n’ai pas de relations particulières avec la
junte. J’ai donné ma position face à son
omniprésence dans le temps et il y a eu
quelques problèmes. Ce qui est important
aujourd’hui, c’est la solution de sortie de
crise. Il faut que tous les acteurs de la vie
politique sachent qu’on est à un point
difficile et que chacun doit faire un effort
pour accepter l’autre, afin de trouver le
chemin de sortie de crise.
N’avez-vous pas peur pour votre
sécurité, quand on sait qu’il y a à peine
un mois que vous êtes rentré au pays,
après avoir été la cible des militaires ?
J’ai fait plus de 11 mois à l’extérieur et
c’était très difficile. Mais je crois que c’est
un choix qu’on a fait. Nous sommes engagés
dans la politique, il faut avoir le
courage physique d’affronter tout ce qui arrivera.
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