Réaction de soumaïla Cissé contre l'adoption du DPG du Premier ministre Moussa Mara - maliweb.net
DPG du Premier ministre Moussa Mara
Chers amis,
Le Vendredi 2 Mai 2014, l’Assemblée Nationale du Mali a voté pour la Déclaration de Politique Générale du Premier Ministre Moussa Mara.
Cette belle unanimité de la majorité (121 pour et 22 contre) cache en réalité des insuffisances graves, des incohérences réelles et l’absence de réponses satisfaisantes à des interrogations pertinentes.
Ces insuffisances et ces incohérences ont été largement relevées et stigmatisées par les députés de l’opposition regroupés au sein du groupe parlementaire Vigilance Républicaine et Démocratique (VRD), dont vous trouverez ci-dessous l’Explication du Vote Négatif.
Quant à moi, en mission de la commission de l’Union Africaine, j’ai participé à l’élaboration du document. J’ai suivi depuis Bujumbura, au Burundi, les différentes étapes et suis resté en contact étroit et permanent avec mes collègues du groupe VRD.
C’est le lieu de féliciter le président de notre groupe pour sa combativité à défendre les droits de l’opposition républicaine, face à un président de l’Assemblée Nationale dont le parti pris flagrant pour le gouvernement ne fait l’ombre d’aucun doute.
Mes autres collègues du groupe parlementaire par leur tenue, par la pertinence de leurs propos et par la hauteur prise dans les débats font notre fierté et celle des maliennes et des maliens.
Je dis tout simplement qu’en défendant avec dignité le Mali face à l’improvisation, la gabegie et le manque de vision le groupe VIGILANCE RÉPUBLICAINE ET DÉMOCRATIQUE a redonné ESPOIR aux maliens.
MERCI POUR VOTRE COURAGE ET VOTRE HARGNE À DÉFENDRE LE MALI.
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Explication du vote
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Groupe parlementaire Vigilance Républicaine et Démocratique
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Députés de la 5ème législature,
Je voudrais tout d’abord rendre grâce à Allah le tout puissant qui nous a permis en ce vendredi saint de nous retrouver pour discuter de l’avenir du Mali, à travers la Déclaration de Politique générale de Monsieur Moussa MARA, Premier ministre.
Monsieur le Président,
Mesdames, messieurs les Députés,
Le Groupe parlementaire Vigilance Républicaine et Démocratique (VRD) apprécie hautement la diligence avec la quelle le Premier ministre a soumis, à la sanction du parlement, la Déclaration engageant la responsabilité de son Gouvernement. Cet exercice relevant d’une obligation constitutionnelle n’a cessé d’être réclamé par l’opposition depuis la mise en place le 1er janvier 2014 de la 5ème législature.
Placée selon le Premier ministre sous le signe du sursaut national, cette déclaration de politique générale, la première après la grave crise que notre pays a connue ces deux dernières années, devait faire l’objet d’un examen minutieux, sans complaisance et le plus objectif possible.
Monsieur le Président et chers collègues,
Nous avons écouté le Premier ministre à la présentation de sa DPG et nous avons suivi avec un grand intérêt les questions à lui adressées par les Députés et les réponses qu’il a apportées. Le moment est donc venu de se prononcer sur ladite Déclaration de Politique Générale. La vérité et la sincérité, socle de la démocratie, doivent être les valeurs à respecter avec rigueur dans cette appréciation.
Monsieur le Président,
Notre pays sort d’une crise grave qui a impacté négativement le tissu économique, culturel et social. Dans ce contexte, la Déclaration doit répondre aux attentes des populations et créer l’espoir qu’elles aspirent légitimement pour un avenir meilleur. La présente Déclaration vient au moment où l’espoir des populations, né après les élections présidentielles, s’est déjà vite effrité. Dans ce contexte, la Déclaration de politique générale à proposer doit tendre à inverser cette situation et le plus rapidement possible pour le bien être des maliens.
Mesdames, Messieurs les Députés,
L’heure est grave. La présente Déclaration ne prend pas toute l’ampleur de cette gravité. Elle renferme de graves insuffisances tant dans sa forme que dans son fond.
Sur la forme, il est à noter que le texte lu par le Premier ministre, mardi dernier modifie en plusieurs endroits le document remis aux Députés. En conséquence, il y a lieu de remettre à la représentation nationale le texte présenté en plénière.
Mesdames, Messieurs les Députés,
Les insuffisances révélées dans cette déclaration portent sur sa structuration, les déviances au plan constitutionnel, la quasi absence des orientations politiques. Bref, elle apporte peu de solutions aux problèmes des maliennes et des maliens.
Dans sa conception, elle n’émane pas d’un programme politique et ne se base pas nullement sur un état des lieux bien cerné, notamment en ce qui concerne la situation financière du pays. Ce dernier point, bonne pratique de gouvernance publique, demeure une obligation légale dans notre pays, depuis juillet 2013. A titre de rappel, Monsieur le Président, la loi portant approbation du code de transparence dans la gestion des finances publiques fait obligation au Gouvernement de préparer un rapport audité et publié, dans les trois mois qui suivent chaque alternance politique, sur la situation globale des finances publiques, et en particulier la situation du budget de l’État et de son endettement. Depuis septembre 2013, il y a eu alternance politique et à ce jour ce rapport n’est pas encore disponible. Il est donc permis de comprendre que la non disponibilité de cette situation, à bonne date, est de nature à douter de la faisabilité du catalogue des intentions d’actions futures proposées.
Par ailleurs, partout où la Déclaration s’est efforcée à faire apparaitre les programmes d’actions des départements, elle fait la liste des projets en cours d’exécution ou le plus souvent en cours de finition et renvoie l’avenir de ces secteurs à des études à réaliser.
Au plan constitutionnel, la présente déclaration épouse dans une première partie l’aspect de politique générale et dans une seconde partie l’aspect programme du Gouvernement. Nous sommes donc fondé à conclure que cette Déclaration innove et cela contrairement à la Constitution qui dispose que le chef Gouvernement présente un Programme du Gouvernement ou une Déclaration de Politique Générale. Le présent Document traite insuffisamment chacune des deux parties.
A la page 12 de la Déclaration, il ressort concernant la reforme constitutionnelle je cite : « Le Gouvernement engagera bientôt le processus devant conduire à cette reforme et l’ensemble des acteurs politiques, de la société civile, de l’administration ainsi que toutes les forces vives seront associées à cet exercice ». Notre pays doit améliorer sa démocratie et les valeurs de la République. Ces derniers mois nous constatons plusieurs dérives en matière de bonnes règles de démocratie. De grâce ressaisissons-nous et évitons de transposer ces déviances sur la loi fondamentale. En effet et à titre de rappel, l’initiative de la révision constitutionnelle appartient concurremment au Président de la République et aux Députés. C’est pour dire que le gouvernement doit se consacrer entièrement et uniquement à ses missions.
Concernant les 6 axes, je fais miennes les insuffisances et contributions faites par les Députés du Groupe. Nonobstant, je voudrais les compléter sur les axes 2,5,6.
- Concernant l’axe 2 : la restauration de l’intégrité du territoire et la sécurisation des biens et des personnes. La Déclaration met l’accent sur la sécurité dans les villes en indiquant, je cite : « nous ferons de nos villes des havres de sécurité où la peur change de camp et où les malfrats seront terrorisés ». Elle est muette sur l’insécurité des campagnes qui aujourd’hui affiche un niveau de risque très élevé ; les bandits et assaillants disposant des armes sophistiquées. Cette insécurité touche le capital des agriculteurs (bœufs de labours), le cheptel des éleveurs, les bureaux des agences des banques dans les cercles etc.
- Au titre du 5ème axe : la construction d’une économie émergente. Une économie émergente doit être une économie compétitive et exportatrice. La Déclaration énonce un taux de croissance à 2 chiffres d’ici 2018, mais elle reste muette sur les politiques à mettre en œuvre pour y arriver. Il en est de même pour l’amélioration de la pression fiscale sur la base de reformes pour lesquelles aucune orientation n’est donnée. La Déclaration est muette sur la nouvelle reforme en cours concernant les finances publiques devant permettre à notre pays de passer des budgets de moyens è ceux de résultats. Cette reforme majeure dont la mise en œuvre est progressive, devait être au cœur de l’amélioration de la gouvernance des finances publiques. Il en est de même pour le code de transparence dans la gestion des finances publiques. La Déclaration est muette sur la loi d’orientation du secteur privé adoptée le 30 décembre 2011. Cette reforme majeure pour le secteur privé méritait de figurer dans la Déclaration. Par ailleurs, cette loi dispose en son article 86 : l’État dresse tous les deux ans l’état du secteur privé et ses perspectives de développement. Cette situation devait être faite en 2013. Elle allait combler la carence d’un état des lieux indispensable à la relance du secteur privé. Quant aux secteurs de l’industrie et des mines, des intentions sont formulées pour prendre en charge les préoccupations de l’Organisation Patronale des Industriels, relire le code minier, élaborer un programme décennal du développement industriel et minier. Le Gouvernement ne fait aucune annonce en termes de soutien à l’industrie notamment manufacturière. Bref le secteur qui génère des emplois permanents durables est oublié. Dès lors la question du comment faire du Mali un pays émergent se pose ? Pour ce qui concerne l’Artisanat aucune disposition n’apparait pour faire de ce secteur un pôle d’exportation profitant des facilités commerciales bilatérales comme l’AGOA.
L’évocation des 5 transitions est une bonne chose, elles sont encore au stade des idées.
- Enfin le 6ème axe : la mise en œuvre d’une politique active de développement social. Sur ce chapitre, la Déclaration reprend les programmes d’actions en cours et ne définit pas de nouvelles orientations en la matière de façon significative. Il aurait été utile de décider d’un mécanisme efficace de financement de la sécurité sociale qui garantit des revenus surs aux retraités civils comme militaires. La question du pouvoir d’achat est capitale, toutefois, aucune orientation sérieuse n’est faite dans la Déclaration. De l’indépendance à nos jours les augmentations des salaires ont été timides. Cette approche a atteint ses limites et c’est pourquoi l’heure est d’opter pour une amélioration conséquente des salaires pour booster la croissance. En effet, un pays ne peut se développer avec des bas salaires. L’augmentation des salaires dans l’administration est faisable à travers un relèvement du point indiciaire doublé de la refonte du système des indemnités et des primes. Elle peut également s’opérer à travers la revue à la baisse de la fiscalité sur les salaires. Ces mesures peuvent conduire au doublement des salaires. Elles ne pourront nullement induire une inflation si l’État joue convenablement la régulation des marchés.
En définitive et en m’adressant à Monsieur le Premier ministre, je dis ceci :
Quand nous vous regardons, quand nous donnons de la vertu à votre jeunesse, nous avons envie de vous faire confiance.
Mais quand nous vous écoutons avec attention ;
quand nous regardons en face de nous votre majorité qui n’a pas daigné vous applaudir une seule fois pendant les 2h 26 mn de votre discours ;
quand nous constatons le déséquilibre de cette majorité en votre défaveur ;
quand nous doutons que vous soyez le chef d’un gouvernement dans lequel vous n’avez aucun représentant de votre parti ;
et enfin vu les limites objectives de votre déclaration de politique générale, le groupe parlementaire VRD ne peut vous accorder sa confiance et votera NON à la DPG que vous avez présentée.
Vive la République,
Vive la Démocratie,
Que Dieu bénisse le Mali.
Mody N’Diaye
Le Président du groupe VRD
Bamako, le 2 mai 2014
dimanche 4 mai 2014
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